Ma tête est remplie de pensées.
Si je les prends pour des vérités,
Elles dirigeront ma vie.
Selon Daniel Amen, le cerveau produit naturellement environ 60 000 pensées par jour, dont 80 % seraient négatives.
C’est énorme.
Plusieurs sont récurrentes et peuvent devenir obsédantes, principalement lorsqu’on leur donne trop de place ou lorsqu’on tente de les chasser. En effet, nous avons tendance à repousser nos pensées, à se dire « Arrête de penser à ça! » C’est une excellente tactique pour que les pensées reviennent avec davantage de force.
Si je vous dis ne pensez pas à votre meilleur ami, que se passe-t-il?
N’y pensez pas. Non, ne pensez pas à votre meilleur ami.
Et bien oui, vous pensez à votre meilleur ami. Le cerveau est fait comme ça. Plus on repousse, plus ça revient. Alors comment fait-on autrement?
Je dirais que plutôt que de tenter de chasser les pensées difficiles, l’idée est de transformer la relation que nous avons avec ces pensées.
PENSÉE UTILE OU INUTILE ?
Premièrement, il s’agit de déterminer si une pensée est utile ou non. Une pensée utile est une pensée qui, lorsqu’elle se présente, vous permet de vous rapprocher de la vie que vous souhaitez ou de trouver une manière de composer avec une situation ou un problème. Avoir la pensée : “Les enfants m’attendent à la garderie” est probablement utile, alors je vous en prie, agissez pour être le parent que vous voulez être.
Avoir la pensée qu’on n’est pas assez intelligent pour réussir un examen pourrait ne pas être utile.
LA DÉFUSION COGNITIVE, C'EST QUOI ?
Selon la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT), lorsqu’une pensée non utile semble prendre beaucoup d’importance, c’est probablement que vous fusionnez avec cette pensée, comme si vous regardiez le monde à travers cette pensée. Elle est collée à vous et elle prend le contrôle, car vous agirez probablement différemment en présence de cette pensée (p. ex. : rester au lit, vous isoler, abandonner, changer de plan, culpabiliser, etc.).
Lorsqu’une pensée vous semble non utile et qu’elle prend trop d’importance, il est souhaitable de défusionner. Je vous explique. Imaginons une radio (ou un appareil “bluetooth” pour les plus jeunes) qui démarre à n’importe quel moment et se met à dire des phrases telles que « Je suis nul » ou « Je n’y arriverai jamais ». Si vous écoutez le message, que vous y adhérez et que vous commencez à agir en fonction de cela, vous avez fusionné avec cette pensée.
La défusion nécessite de comprendre qu’une pensée est un ensemble de mots mis bout à bout, une histoire que votre tête vous raconte. La défusion vise à en accepter la présence sans nécessairement y croire ou y adhérer. Le but et que cette pensée cesse de vous contrôler et que vous retrouviez plus de liberté pour faire ce qui compte vraiment pour vous, même en présence de pensées difficiles.
Le pouvoir que nos pensées ont sur nous dépend en fait du pouvoir qu’on leur donne.
PRATIQUER LA DÉFUSION COGNITIVE
Un exercice de défusion, tiré la thérapie d’acceptation et d’engagement (Le piège du bonheur, Russ Harris), propose de prendre une pensée non utile, comme exemple : « Je n’y arriverai jamais » et :
- la répéter pendant 15 secondes en ajoutant devant [Je suis en train de penser que… (insérer ici la pensée non utile)]. Donc, par exemple, Je suis en train de penser que je n’y arriverai jamais. Observez ce qui se passe.
- ensuite, la répéter pendant 15 autres secondes en ajoutant [Je remarque que je suis en train de penser que… (insérer ici la pensée non utile). Par exemple, Je remarque que je suis en train de penser que je n’y arriverai jamais. Observez ce qui se passe.
Ainsi, plutôt que d’embarquer dans l’histoire “Je n’y arriverai jamais” et d’agir comme tel (en déprimant ou en abandonnant le projet qui vous tient à cœur), vous pouvez prendre un recul sur vos pensées, accepter leur présence en vous sans leur accorder trop d’importance, puisqu’elles ne sont, au fond, que de simples pensées. Et de choisir ensuite, plus librement, vos actions.
En résumé
- Prendre conscience que vous avez une pensée qui prend trop d’importance (possible fusion).
- Déterminer si elle est utile ou non.
- Si cette pensée est utile : passer à l’étape 5.
- Si cette pensée n’est pas utile : faire l’exercice de défusion proposé ci-haut.
- Agir selon ce qui est important pour vous.
Je vous souhaite une bonne pratique.
Pour aller plus loin :
Si vous avez tendance à fusionner avec des pensées anxieuses, la formation L’anxiété, j’en ai plein mon casque! pourrait vous être utile.
Vous n’êtes pas l’anxiété; elle vient vous visitez et il est possible de reprendre le pouvoir sur elle et de mieux vivre en sa présence.
Pour en savoir plus sur l’autrice de cet article :
Bibliographie
Harris, R. (2021). Le piège du bonheur : Arrêtez de vouloir être heureux à tout prix et vivez enfin pleinement. Montréal : Les Éditions de l’Homme.
Harris, R. (2020). Passez à l’ACT (2e édition) [formation en ligne]. Institut de psychologie contextuelle (Montréal).